IntroductionL’idée de représenter notre environnement est très ancienne.
La plus ancienne carte que l'on ait retrouvée est une carte mésopotamienne gravée sur de la terre cuite. Si les Européens vont marquer fortement le sujet, l’origine de la cartographie se situe davantage dans le proche et moyen orient. On peut citer l’exemple des babyloniens et la carte de Sippar du Ve siècle avant notre ère, sans oublier les Chinois qui firent de grandes choses sur des supports très différents des notres
Cette carte Babylonienne du monde est une représentation symbolique du monde connu par les Babyloniens, elle date d’~600 AEC.
Elle a été découverte à Sippar en Irak et est exposée au British Museum.
Elle omet délibérément les Perses et les Égyptiens qui leurs étaient pourtant connus à l’époque.
Le golfe persique est dessiné comme une rivière encerclant le monde connu, orienté avec l’Ouest en haut.
Le rectangle supérieur représente Babylone.
Les ronds autour de Babylone situent des villes.
Le rectangle inférieur représente les régions marécageuses du sud de la Mésopotamie.
Les fleuves Euphrate et Tigre coulent vers le golfe Persique.
Les triangles au-dela du cercle montrent l’existence de régions mystérieuses.
On voit déjà poindre à cette époque plusieurs facteurs qui caractérisent la production cartographique.
Au-delà des contingences technologiques qui limitent la capacité à produire des données exactes, la représentation cartographique du monde sera pendant très longtemps, et encore actuellement en partie, conditionné par la représentation que l’on se fait du monde et des choses. Ceci porte à la fois sur les questions d’ordre religieux mais aussi philosophique, sociologique et politique.
Au fil des époques les finalités de la cartographie ont pu varier
1 000 Av JC nos ancêtres se représentaient la terre comme flottant sur l’eau
Pour les babyloniens, la terre est un volcan creux flottant sur l’eau et avec le ciel comme un « couvercle ».
Pour les hébreux la terre est un cercle posé sur des piliers au dessus des eaux avec un couvercle au dessus
Les Egyptiens voient l’univers comme une boite rectangulaires avec la terre au fond et le ciel comme un couvercle percé de trous par ou passe la lumière.
Les grands changements dans la représentation de l’univers arrive avec les Grec.
Les premières représentations sur des supports de terre cuite de métal et de papyrus avaient pour principale finalité des itinéraires ou des limites de propriété pour l’imposition.
C’est dans ce dernier but d’organiser l’impot (déjà) par exemple que en 1150 AvJC Ramses II lança une très grande opération de cartographie
La cartographie antiqueUn des premiers sujets qui se pose pour ceux qui veulent représenter la terre est de savoir si elle est plate ou elle est ronde.
Comme pour énormément de sujets, les philosophes et scientifiques de la Grèce antique vont se forger cette conviction que la terre est ronde.
On attribue traditionnellement cette idée à Thalès de Milet au VIe siècle avant notre ère, Pour lui la terre est une galette plate flottant sous une cloche d’air
Puis Pythagore, s’appuyant sur ses travaux de géométrie pense que la forme de la terre est une forme parfaite sphérique
Aristote au IV secle AvJC essaye d’aporter des preuves par l’observation et notre que pour un navire qui disparait à l’horizon, c’est b’abord la coque avant les mats qui disparait
Puis c'est Ératosthène, directeur de la bibliothèque d'Alexandrie (ainsi qu'inventeur du terme « géographie ») au IIIe siècle avant notre ère, qui est le premier à avoir calculé la circonférence de la Terre avec une faible marge d'erreur (je ferai un article sur le sujet)
Voici les premières représentations cartographiques du monde établies par les grecs
Le monde selon Anaximandre, au VIe siècle avant notre ère
Améliorations par Hécatée de Milet à la fin du VIe et au début du Ve siècle avant notre ère).
Carte d'Ératosthène du IIIe siècle avant notre ère, construite autour du méridien d'Alexandrie (29° 53′ E).
Mais celui qui a fait le travail le plus novateur, le plus scientifique et le plus admirable pour son temps, c’est Ptolémé. Ilpose les bases de la cartographie moderne dans son traité la Géographie. Comme il est mathématicien, il dresse des tables de coordonnées géographiques pour plus de 8 000 lieux et donne des instructions pour créer le premier planisphère (représentation à plat de la surface d'une sphère) avec une projection conique, avec un équateur, orientée le nord en haut[2]. Il découpa la terre en 180 logitude pour les terres inconnues et 180 pour les terres connues
Il est confronté à deux problèmes, le calcul précis de la longitude d'un lieu est difficile et la projection d'une sphère sur le papier est imprécise. Il partit aussi sur les calculs de circonférence de terre faits par Posidonios.
Ses travaux redécouverts à la renaissance lors des expéditions vers le nouveau monde firent commettre des erreurs à Christophe Colomb qui considéra l’Inde beaucoup plus proche qu’en réalité.
Carte de Sebastian Münster en 1544, dessiné d'après les informations du Traité de géographie de Ptolémée.
Les cartes romainesLa table de Peutinger
C’est la dernière carte romaine connue Cette carte, de 6,82 mètres de long sur 34 centimètres de large, représente l'ensemble du monde connu à cette époque c'est-à-dire de l'Empire romain jusqu'à l'Inde et les limites de la Chine, avec l'indication des principales routes reliant les villes. En revanche, c'est une représentation schématique qui ne tient pas compte de l'échelle : c'est en fait plus proche d'un plan métro que d'une carte routière. De plus, cette carte contient quelques erreurs et inexactitudes.
Extrait de la table de Peutinger, montrant ici le réseau routier autour de l'embouchure du Rhône, avec d'ouest en est Arelate (Arles), les Fosses Mariennes, Massilia (Marseille) et Aquae Sextiae (Aix-en-Provence).
L'histoire du calcul de la circonférence de la terreComme évoqué, la rotondité de la terre fut un sujet des plus polémiques dans l’histoire de la géographie, des cartes et de la représentation de la terre ; Sujet aux confins de l’observation et des croyances religieuses. Contrairement à une idée parfois répandue, et comme cela est dit plus haut, l’idée que la terre est ronde et non pas une sorte de galette est apparue chez les penseurs et astronomes grecs.
Cette idée est généralement issue de l’école pythagoricienne (du nom du mathématicien au célèbre théorème) dès le VI° siècle avant notre ère. On trouve aussi cette idée chez les deux grands philosophes grecs que sont Platon (Ve siècle av. J.-C.) et par Aristote (IVe siècle av. J.-C.)
Je vais m’attarder ici sur Eratosthène qui vécu trois siècles avant notre ère (-276, -194) et fut un très grand astronome, géographe, mathématicien et philosophe. (et oui à cette époque les compétences scientifique et philosophiques ne faisaient presque que un)
Ce que l’histoire a retenu de lui principalement ce sont ses travaux pour évaluer la circonférence de la terre. Il fut le premier à realiser ce travail de façon scientifique même si Aristote parle d’un mesure évaluée à 60 000 km environ.
Eratosthène évalua la circonférence à 39375 km pour une grandeur réelle retenue aujourd’hui à 40 070 km, une belle prouesse !
Voici un aperçu de sa méthode
Le soleil au fond des puitsEratosthène, grand astronome se rendit compte qu’à Syène, le 21 juin à midi, le soleil est exactement à la verticale du sol (et que ses rayons peuvent donc atteindre le fond des puits.) Si le 21 juin à Syène, le Soleil est à la verticale du sol, c’est que la trajectoire de ses rayons à cet endroit passe par le centre de la Terre. Pour déterminer la circonférence de la Terre, Erathostène a alors réalisé une deuxième mesure
A l’ombre du phare.Le 21 juin, mais cette fois à Alexandrie, il observa l’ombre du Phare, et mesura l’angle qu’elle formait avec son sommet . Eratosthène observa que l’angle formé valait 1/50ème de cercle, soit 360°/50 = 7.2°.
Puisque la mesure de cet angle par Erathostène à Alexandrie donne 1/50ème de cercle, la distance entre Syène et Alexandrie vaut 1/50ème de la circonférence de la Terre. Et pour calculer celle-ci, il ne nous reste plus qu’à connaître la distance de Syène à Alexandrie…et c’est là que le chameau entre en jeu.
A dos de chameauPour mesurer les distances, on sait qu’un chameau met environ 50 jours pour aller d’Alexandrie à Syène, et qu’en un jour il parcours une distance de 100 stades (le stade étant l’unité de distance en vigueur à ce moment là). La distance entre les deux villes est donc d’environ 5000 stades. Et puisque cette distance vaut 1/50ème de la circonférence de la Terre, c’est que cette dernière mesure environ 250 000 stades.
Euh, mais ça vaut combien un stade ? Apparemment, chez les Egyptiens, le stade valait 157.5 mètres. Ce qui nous donne comme estimation de la circonférence de la Terre 39 375 km. Pas mal quand on sait que la véritable valeur est environ de 40 000km !
Réflexions sur la validité de la mesureLa première, c’est bien sûr que la Terre est ronde ! Or on sait aujourd’hui qu’il s’agit plutôt d’une sphère légèrement aplatie au niveau des pôles. Ce qui fait que la circonférence de l’équateur mesure environ 70km de plus que la circonférence qui passe par les pôles.
La deuxième supposition, c’est que les rayons du Soleil qui frappent la Terre sont bien parallèles entre eux. Cela revient à supposer que le Soleil est situé suffisament loin, ce qui en l’espèce est une approximation tout à fait raisonnable.
Enfin la dernière hypothèse faite par Eratosthène, c’est que Syène et Alexandrie sont situées sur le même méridien. C’est en effet une supposition implicite quand on réalise la figure qui nous a permis de conclure. Bien que les deux villes soient toutes les deux situées sur le cours du Nil, elle ne sont pas strictement sur le même médirien, comme le montre la carte ci-contre. Heureusement, Eratosthène commis une autre erreur qui compensa celle-ci : par la technique du chameau il sous-estima légèrement la distance entre les deux villes (il devait avoir des chameaux de compétition…)
A suivre....