Mont Valérien : un lieu d’histoire et de mémoire
Le Mont-Valérien est une colline haute de 161 m qui domine la vallée de la Seine et Paris, située sur les territoires des communes de Suresnes, de Rueil-Malmaison et de Nanterre, dans le département des Hauts-de-Seine (92).
Vu du ciel Cette colline est utilisée par l’homme depuis fort longtemps dont on situe le début aux environs du X° siècle de notre ère.
Une représentation ancienne Le premier usage fut religieux : de nombreux ermitages, chapelle, églises et monastères se sont succédé sur cette colline boisée, un peu retirée ; Au XVII° siècle, c’est même un lieu de pèlerinage.
Avec la révolution il est mis fin à l’utilisation religieuse du lieu puis après de nombreux atermoiement, Napoléon 1° y décide la construction d’une caserne qui sera opérationnelle à partir de 1841. Plusieurs fois modernisé et étendu, ce fort contribue comme 15 autres au réseau de défense de Paris. Ce fort toujours debout, joua un rôle important dans le Siège de Paris et la lutte contre la Commune de Paris en 1870-71.
Sur une carte d'état major En 1849 le physicien français Hippolyte Fizeau utilise le mont Valérien dans une expérience destinée à mesurer la vitesse de la lumière.
Pendant la première Guerre mondiale, la forteresse est utilisée pour la défense aérienne de Paris, un projecteur y étant installé pour voir les avions la nuit.
Aujourd’hui encore il a une fonction militaire et abrite la Direction interarmées des réseaux d'infrastructures et des systèmes d'information d'Île de France / 8e régiment de transmissions (DIRISI IDF/8e RT)
Un lieu d’histoireIl serait peut être tombé dans l’oubli ou à tout le moins dans l’anonymat si la deuxième guerre mondiale ne l’avait pas rendu tristement célèbre.
Juin 1940, le France capitule, les allemand l’occupe et investissent ce lieu militaire. Ils vont y stationner quelques troupes mais le lieu assez malsain en raison de l’humidité ne va pas retenir trop leur attention pour des fins strictement militaires.
En revanche, ils vont se servir de ce lieu en raison de son éloignement de la ville, de la discrétion qui l’entoure (à l’époque on est encore à l campagne et il y a beaucoup de bois et forets autour) pour en faire LE LIEU où ils vont exécuter sur la zone de l’ile de France les prisonniers condamnés à morts et tout particulièrement ceux accusés de résistance, les otages et français libres parachutés sur le sol français.
Au total, c'est plus d'un millier d'exécutions d'otages et de résistants qui ont eu lieu au Mont-Valérien. Au 30 décembre 2008, 1 014 fusillés identifiés. Ce sont tous des hommes, âgés d'au moins 16 ans. Le manuel de droit criminel de la Wehrmacht interdit de condamner à mort les enfants de moins de 16 ans et de fusiller les femmes
Amenés de l'extérieur en camion pour leur exécution, ils étaient enfermés dans une chapelle désaffectée puis conduits dans une clairière située à une centaine de mètres en contrebas. Leurs corps ont été ensuite dispersés dans les cimetières de la région parisienne.
De ces faits dramatiques, on ne dispose que de quelques témoignages :
-Une photo prise clandestinement par un officier allemand et retrouvée après la guerre
- Les notes d’un prêtre allemand qui était là pour accompagner les condamnés, permettait d’informer les familles e de leur transmettre leur dernière lettre.
- Il reste aussi les derniers poteaux d’exécution et les derniers cercueils restés vides
Photo d'exécution
Les derniers vestiges dans la chapelle où les condamnés attendaient leur mise à mort
poteaux d’exécution et cercueils
Il nous reste aussi quelques lettres écrites par ces condamnés à leurs familles. On a tous entenu parler de la lettre de Guy Mocquet, mais je vous présente deux autre aujourd'hui.
Une avec copie de l'original l'autre avec son texte.- Cliquer ici pour le texte:
Lettre de BAUCE Georges, Roland [dit Château] Né le 5 mars 1924 à Paris (XXe arr.), fusillé par condamnation le 23 octobre 1943
Prison de Fresnes, le 23 octobre, 1943
Chers parents,
Lorsque vous recevrez cette lettre, je serai exécuté.
Je vous demande d’être tous courageux et de penser un peu à moi. Je remets les pleins pouvoirs à mon frère André pour veiller à l’instruction de tous ses petits frères et sœurs au cas où un accident viendrait à survenir soit à ma mère soit a mon père. J’espère qu’il saura s’acquitter de cette tâche avec dévouement. Pour mes parents, je leur demande de penser un peu à moi et surtout de surveiller l’éducation de mes petits frères et sœurs ; pour mon frère Claude, je vous demande de faire de ce futur homme un garçon d’une grande intelligence et de pourvoir, si cela est son désir, à la poursuite de ses études et de lui parler souvent, de moi, car en ce qui me concerne je ne puis rien regretter.
Je suis resté dans mon idéal toujours droit et honnête jusqu’au bout ; nous sommes tous courageux et nous vous quittons pleins d’espoir en un avenir meilleur et radieux pour vous ; c’est la certitude, d’y avoir contribué qui nous réconforte.
Soyez courageux car nous avons une belle mort, il vous faut beaucoup plus de courage à vous, pour continuer de vivre, qu’à moi pour quitter la vie, et c’est pour cela que je supplie tous mes amis de vous accorder leur sollicitude en récompense de notre sacrifice.
Votre fils qui vous quitte, en criant face aux Boches : "Vive la France, mon pays ! "
Adieu à tous.
Georges Bauge
Un lieu de mémoireSur l’initiative du Général de Gaulle le 18 juin 1960 est inauguré sur ces lieux symboliques très chargé d’histoire un lieu de mémoire, celui de la France combattante.
C’est ainsi que prend forme l’image actuelle du fort avec
-cette place d’arme pour les cérémonies de souvenir
-16 sculptures de bronze réparties de part et d’autre d’une immense croix de Lorraine rappelant les faits majeurs de la deuxième guerre
-Sous la croix une flamme du souvenir et l’accès à une crypte
Une crypte dans laquelle On trouve le 16 cercueils recouverts du drapeau français et où reposent les corps de 16 combattant morts pour la France représentant toutes les armes, des militaires et résistants, des français de toutes origines, … la diversité de la France combattante.
Ils entourent une urne contenant les cendres de déportés anonymes des camps de la mort.
Une place reste vide pour accueillir le dernier Compagnon de la Libération qui mourra.
En surface un parcours mémoriel sur les traces de ce chemin de croix des exécutés de la barbarie nazie, le parcours du souvenir qui permet de parcourir depuis la chapelle le chemin suivi par les condamnés jusqu’à la clairière, lieu des fusillades.
La place d'armes
La croix de Loraine, l'accès à la crypte et la flamme
La crypte
La clairière des exécutions
Le monument aux morts
Un beau lieu de mémoire et de souvenir qui très poignant à visiter et qui doit toujours nous appeler à la vigilance.